De plus en plus de personnes savent que l’argent prêté par les organismes bancaires est créé puis détruit lors des remboursements. Néanmoins, une question subsiste : comme la somme empruntée est remboursée en plus des intérêts et que celle-ci est éliminée, c’est donc bien le banquier qui remporte la mise au final ? Cela peut sembler logique, mais la réalité est différente. En effet, au cœur de ce paradoxe se trouve le principe de récursivité.
Principe de récursivité : définition
Voici un exemple simple. Lorsque vous payez avec votre carte bleue, vous utilisez le plus souvent le système VISA (un acronyme qui signifie : Visa International Service Association). Ainsi, le terme VISA est utilisé pour se définir lui-même. C’est exactement ce que votre prof de français vous interdisait de faire quand vous étiez au lycée. La récursivité c’est tout simplement utiliser un concept qui fait appel à lui-même.
Le terme littéraire associé est « mise en abyme » (définition du Dictionnaire de l’Académie française : « Procédé par lequel on intègre dans un récit, dans un tableau, un élément signifiant de ce récit ou de ce tableau, qui entretient avec l’ensemble de l’œuvre une relation de similitude. »). Aussi, rappelez-vous du film Inception, dans lequel le héros, incarné par Leonardo DiCaprio, est confronté à des réalités entremêlées devenant de plus en plus déroutantes. Finalement, la récursivité est un système efficace, présent partout.
Explications sur le métier de banquier
Au niveau économique, maintenant, où se trouve la place du banquier ? Vous allez tout comprendre avec cette histoire. Imaginez un village peuplé de 11 habitants, dont 10 artisans. Le dernier ne possède aucun don manuel, mais il a fait des études. Les autres le surnomment « l’Intello» et il vit de l’aumône.
Le principe de création monétaire
Cette petite communauté partage le fruit du travail de chacun, mais les échanges seraient plus simples avec de l’argent comme dans le village annexe. Pourquoi ? Car il s’agit d’une mesure objective, chiffrée, qui permet d’apaiser les conflits et de tenir rigoureusement les comptes.
Les villageois tiennent conseil pour savoir qui peut fabriquer cet argent pratique. L’Intellectuel se porte volontaire, mais il formule trois conditions :
- Ils acceptent de rendre l’intégralité de la somme à la fin de l’année, car il s’agit d’un prêt.
- Ils devront le rémunérer avec un taux d’intérêt de 10 %, car il ne supporte plus de vivre de la charité.
- Enfin, tout le village l’appellera « Monsieur le banquier » pour sa dignité personnelle.
La destruction de l’argent remboursé
Les habitants approuvent sa proposition. Le banquier descend donc à la cave pour imprimer 11 000 « monetums ». Dès lors, il prête 1 100 monetums (mt) à tout le monde et tout devient plus simple. En effet, il est possible d’attribuer un prix dans cette monnaie aux objets fabriqués du village. Chaque artisan peut conserver son argent pour le dépenser plus tard, etc. Les échanges commerciaux sont facilités.
À la fin de l’année, le banquier s’adresse à ses pairs pour leur demander de lui retourner l’argent. Ils s’exécutent sans faute, car ils savaient qu’ils devaient garder 1 100 mt au 31 décembre. Il se saisit des billets rendus et les brûle devant l’assemblée, à la consternation générale !
Le banquier s’exprime alors : « Cet argent a été créé de toute pièce afin de vous le prêter. Comme il n’est issu d’aucun travail, il est logique qu’il soit détruit. »
La valeur du banquier
Après réflexion, les villageois se rallient à l’idée que gagner de l’argent sans travailler est impossible. Cependant, le forgeron prend la parole : « Pas de problème pour brûler l’argent créé. Néanmoins, il nous a été très utile pour les comptes et l’épargne. Peux-tu en refaire ? J’ai des commandes en cours et il faut que mes clients me paient. »
Le banquier lui répond : « Très bien, je m’occupe de l’argent. En revanche, n’oubliez pas que je vous ai demandé un intérêt de 10 % sur les prêts de l’année dernière. Je souhaite que la valeur de mon travail soit considérée et que vous me donniez une partie de votre production. Ainsi, je vous avance 1 100 mt chacun, mais vous me paierez les anciens intérêts aujourd’hui. Je garde 100 mt par personne, il restera donc pour vous et moi 1 000 mt pour les douze mois à venir. » L’ensemble du village est d’accord.
Intérêts d’emprunt : définition
À la fin de la deuxième année, le banquier dresse l’inventaire des comptes des villageois. Le total (sans la part du banquier) est de 11 000 monetums. En effet, pendant l’année, le banquier a dépensé tout son argent chez les artisans, étant donné qu’il ne produit et ne vend rien. Ces derniers remboursent leur prêt de 1 100 mt, et les 11 000 mt empruntés précédemment sont de nouveau brûlés par le banquier sur la place du village. Quel est l’avantage de cette destruction rituelle (baptisée « contrôle fiscal ») ? Cela permet de vérifier que personne n’en a gardé un peu de côté. Encore une fois, le banquier exige que les intérêts promis lui soient payés. Dès cet instant, les habitants demandent un prêt de 1 100 mt pour l’année à venir sans oublier de payer les intérêts de l’exercice antérieur.
Prêt et remboursement : trouver la juste mesure
En réalité, les prêts sont accordés uniquement pour des projets. D’ailleurs, en l’absence de croissance économique, il est probable que la déflation survienne.
Prêter seulement pour financer un investissement équivaut à gager l’avenir, ce qui est fâcheux. Le prêt permet d’injecter de l’argent dans le système économique, son remboursement consiste à le détruire. Ainsi, si une entreprise emprunte sans capacité de rembourser, cela signifie que l’argent introduit dans le système ne pourra être éliminé. Tout d’abord, la banque se charge d’annihiler la somme non rendue en la prenant sur ses fonds propres. Mais si elle fait faillite, un excès d’argent circulera, ce qui entraînera de l’inflation. Autre solution : détruire cet argent chez les épargnants afin de rétablir l’équilibre, ce que l’on nomme la socialisation des pertes.
Le banquier est le point d’équilibre du système monétaire
Avec cette démonstration, vous êtes à même de comprendre pour quelle raison le banquier touchant des intérêts sur les prêts ne pourra jamais avoir tout l’argent du village. De fait, il fait partie d’un système équilibré dont la particularité est que l’harmonisation de ses comptes se fait avec une année de retard. Il s’agit ici d’un exemple de récursivité bancaire.
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Richard DÉTENTE