Evergrande : cette crise immobilière en Chine est-elle une répétition des subprimes ?

8 mai 2022

Selon nos modèles, après une forte phase de croissance depuis août 2020, le niveau de risque sur les marchés a brutalement augmenté en juillet 2021. Nous avons fait plusieurs vidéos en ce sens pour expliquer que le jeu n’en vaut plus la chandelle sur les marchés depuis l’été 2021. En effet, nous constatons que depuis le 12 juillet, les marchés n’ont rien fait. Après une phase de hausse en juillet-août plus ou moins douloureuse, ponctuée par des pics d’angoisse que l’on peut constater sur l’évolution du VIX, l’indice de la peur sur les marchés US, à la rentrée 2021 les marchés sont globalement au même niveau que début juillet.

Les marchés européens ont dévissé en septembre…

…tout comme les marchés US.

Enfin, comment ne pas parler de la Chine qui a perdu plus de 10 % sur le HSI index.

On va revenir sur la Chine qui a fait couler beaucoup d’encre.

Alors, est-ce la fin des haricots ? Ou alors, est-ce que nous vivons une étape supplémentaire dans cette grande crise multidimensionnelle comme le dirait Henri Regnault ?

Aparté

Pour information, le rythme de mes vidéos avait ralenti en septembre car j’étais à l’hôpital quelques jours pour une opération et j’ai aussi été très occupé par mes autres affaires. Je suis investisseur avant tout et maintenant que je suis en Suisse, je développe des activités de conseils financiers à destination des institutionnels et des personnes résidentes en dehors de l’Union Européenne. Pourquoi en dehors de l’Union Européenne ? Car le démarchage transfrontalier Suisse / Union Européenne est légalement interdit. Pourquoi suis-je parti en Suisse ? Car la réglementation européenne, et notamment française, empêche toute activité de conseil financier conforme à mes convictions. En France, si vous dites à un client de vendre la dette française et ses taux négatifs, d’acheter de l’or qui conserve la valeur depuis 5000 ans, et pour finir vendre l’euro, qui a perdu 30 % depuis 2000 pour un panier de devises étrangères, vous allumez de base, tous les feux rouges des régulateurs.

Si vous ajoutez à cela des obligations en Chine qui gagnent environ 5 % par an et surpassent la très grande majorité des marchés obligataires depuis 10 ans, un peu de finance décentralisée pour placer son cash à 10 % et autres placements considérés comme subversifs, vous serez accueilli comme il se doit. L’Union Européenne est et reste un carcan qui vous protégera jusqu’à la mort, de votre épargne s’il le faut.

Parlons en de la Chine justement.

Affaire Evergrande : les causes de cette gigantesque crise financière en Chine

La situation est critique du point de vue du marché immobilier. La société Evergrande au cœur de ces inquiétudes serait même à l’origine des remous actuels sur les marchés.

Donc avant de parler du fond de cette crise, parlons du cas d’Evergrande qui est au centre de l’attention aujourd’hui. Evergrande c’est le premier développeur immobilier de Chine et cette entreprise est en crise à cause des mesures restrictives imposées sur le financement du secteur immobilier par l’État chinois depuis 2018.

L’histoire n’est pas neuve et les autorités chinoises sont bien au courant de la situation. Alors oui, la situation de cette entreprise est critique, mais prenons un peu de recul pour généraliser le cas de l’immobilier chinois.

Un argument récurrent concerne le niveau de dettes du secteur privé en Chine.

Il y a 2 choses à répondre à cela.

La fin des migrations internes en Chine

Tout d’abord, la Chine vient de terminer un cycle de migration de la population des campagnes vers les villes qui aura duré 20 ans. Ce sont pas moins de 200 millions de personnes qui ont changé de modes de vie.

Les villes ont donc poussé comme des champignons, avec toutes les infrastructures nécessaires qui vont avec. Bien sûr, il y a eu des excès, mais au global la Chine est aujourd’hui un pays disposant d’infrastructures neuves. Alors oui, la dette privée a explosé en 20 ans et surtout depuis 2008 mais en même temps, ils ont de vrais actifs en face.

Le niveau d’endettement de la Chine

Si on regarde l’endettement de la Chine dans sa globalité, en segmentant les 3 composants : dettes des entreprises, dette publique et dette des ménages, la Chine reste moins endettée que les USA ou l’Europe.

Sur ce tableau produit, vous pouvez voir que l’endettement global de la Chine est à 270 %, tandis que les USA sont à 280 % et la France à 320 % à la fin de 2020.

Le rôle des marchés financiers : la différence fondamentale entre la Chine et les USA

Le pouvoir chinois fait le choix de faire passer sa monnaie, c’est-à-dire la stabilité de sa zone économique, avant le secteur privé. Donc, il est classique de voir les marchés actions chinois corriger sévèrement, car c’est le secteur privé qui absorbe les ajustements économiques.

C’est pour cela, entre autres, que la croissance des marchés chinois est bien plus lente que la croissance des marchés US. Dit autrement, en Chine, c’est le secteur privé qui paie les crises tandis qu’aux USA et dans l’Union Européenne, c’est le contribuable.

Evergrande : une crise des subprimes à la chinoise ?

Autre exemple de cette incompréhension, certains commentateurs parlent d’un moment Lehman de la Chine avec Evergrande.

Traduction : La Chine affronte potentiellement un moment Lehman. Wall Street reste impassible

Cela sous-entend qu’une faillite de Evergrande pourrait remettre en cause la stabilité du système financier chinois. Mais attention, il faut se souvenir de ce qui s’est passé avec Lehman Brothers en 2008. Le problème ce n’était pas la faillite de Lehman en elle-même. Le problème c’est que les USA ont laissé se désintégrer un maillon de la chaîne du système financier. En gros, les USA auraient très bien pu ruiner les actionnaires de Lehman Brothers, virer le patron et prendre les rênes pour assurer la continuité du système financier. Dit autrement, en cas de risque systémique, il faut sauver les banques mais pas le banquier.

Les dirigeants chinois sont bien au courant qu’il va falloir que des actionnaires soient ruinés. Si les actionnaires de Evergrande ont déjà tout perdu ou presque, il n’est pas du tout impossible que les dirigeants de l’entreprise passent un sale moment, ainsi que les créanciers obligataires de cette société. Rappelez-vous que Jack Ma a disparu quelques temps pour moins que ça. C’est une leçon de capitalisme que nous donne la Chine. Lorsque l’on investit, on peut perdre et on doit faire face aux conséquences.

Les dirigeants chinois sont totalement conscients de tout cela car ce sont bien eux qui ont imposé la règle des 3 lignes rouges pour apeurer les finances du secteur de l’immobilier.

Les trois lignes rouges du parti communiste chinois

Ce que la Chine appelle les 3 lignes rouges ce sont 3 règles sur l’endettement à ne pas dépasser :

  • un plafond de 70 % sur un ratio du passif sur l’actif ;
  • un plafond de 100 % sur un ratio dette sur capitalisation boursière ;
  • et enfin un ratio sur la part d’emprunt à court terme sur les emprunts globaux.

Bref, le gouvernement chinois a largement annoncé ces mesures de durcissement de l’accès au crédit pour le secteur immobilier depuis 2018. Il a ensuite profité de l’embellie suite à la crise des mesures anti COVID en mars 2020 pour durcir ces réformes et provoquer la crise qu’Evergrande a connue.

Il faut donc remettre les choses à leur place. Pendant que la Chine mène des mesures structurelles, les USA et l’UE ne sont toujours pas sortis des mesures d’aides. On ne parle pas de la même chose tout de même.

Après, est-ce que ce tour de vis va passer tout seul ? C’est peu probable. La situation est critique, car avec Evergrande on ne parle pas de la faillite de l’épicier du coin.

Quel avenir pour Evergrande ?

Comme c’est toujours le cas en Chine, il faut bien faire la différence entre la santé financière du pays et celle du secteur privé. Au bout du compte, Evergrande sera peut être nationalisée si la situation l’exige. Il est impensable que la Chine laisse courir un risque systémique sur sa zone d’influence car elle perdrait totalement la face. L’État chinois semble bien vouloir envoyer un signal fort contre toute tentative de profiter de ce que l’on appelle l’aléa moral, mais pour autant, ils connaissent le cas de Lehman Brothers.

Donc, si les marchés en prennent plein la tête – ce que les lecteurs de la lettre que je corédige avec Didier DARCET savent parfaitement puisque nous les avions alertés en juillet –, ils n’ont pas changé d’avis sur la gestion des finances de l’État chinois.

Le marché obligataire de l’État chinois se porte très bien. Depuis le 1er juillet, il est en hausse de 2 % en dollars. Ce qui est très bien pour ce type de produit,car cela fait plus de 8 % en rendement annualisé.

C’est pour cela que nous avions recommandé en juillet : vendre les actions chinoises et conserver précieusement les obligations chinoises. On ne parle pas de la même chose.

Après, il ne faut pas rester le nez sur le guidon. Que ce soit Evergrande, ou autre chose, là n’est pas le problème de fond. Le fond du problème c’est que les fondamentaux des marchés sont mauvais car les fondamentaux économiques sont terriblement mauvais.

Aujourd’hui, si on fait la pondération entre le risque potentiel et les gains potentiels, ce que l’on appelle « l’espérance » en mathématique, eh bien le résultat est négatif. C’est pour cela que nous sommes aussi précautionneux. Il ne s’agit pas d’une frilosité de ma part ou d’un goût pour le catastrophisme. C’est juste la réalité. Personne ne peut me dire que nous allons échapper aux conséquences de la crise de 2008 et de la crise des mesures anti COVID que nous avons réglées par l’impression monétaire.

La lettre d’investissement : la stratégie grand angle

Pour prendre le contre pied, allez voir ma nouvelle chaîne Grand Angle Crypto pour voir la différence. A contrario, sur les crypto et avec Bitcoin en premier lieu, l’espérance de gain est fondamentalement clairement positive. Les risques sur Bitcoin sont très élevés mais la promesse de gains est bien plus élevée. Donc, toujours en termes de probabilité, vous avez un marché structurellement haussier tant que ses fondamentaux tiennent. C’est l’exact inverse de la situation des marchés financiers.

Cela se ressent même jusqu’à la joie de vivre des gens qui évoluent dans cet écosystème. J’ai rencontré beaucoup de patrons qui innovent dans ce milieu et ces personnes sont juste heureuses car elles vivent dans le Far West. Oui, ils peuvent tout perdre assez rapidement mais au-delà du risque, il y a la promesse de découvrir l’Amérique.

C’est pour cela que dans ma lettre d’investissement nous vous expliquons comment adopter une stratégie de conservation de votre patrimoine diversifié, tout en vous permettant de vous ouvrir à ce monde de la blockchain.

Dans le numéro de septembre je vous ai expliqué comment faire travailler votre cash en dollar à 10% grâce à la finance décentralisée tout en évitant la chute des marchés que nous vivons en ce moment.

Richard DÉTENTE