L’UE est-elle en récession ?
L’Union Européenne est-elle sur le point d’entrer en récession ? Cette question préoccupe de plus en plus les pays de la zone euro, notamment avec la situation actuelle en Allemagne. Faut-il s’inquiéter pour la France et quelles sont les solutions possibles pour atténuer les impacts potentiels ? Pour aborder cette problématique sous un angle différent, intéressons-nous à ce que nous révèlent les marchés financiers. En 2022, un krach majeur s’est produit sur les marchés obligataires européens et américains, bien que nous nous concentrions aujourd’hui sur l’Union Européenne. Une interrogation légitime émerge : pourquoi n’y a-t-il pas eu de krach sur les marchés d’actions ? En examinant de près les tendances actuelles, il devient impératif de considérer le rôle crucial que la croissance économique pourrait jouer dans la préservation de la stabilité financière et dans la prévention d’une récession imminente.
Les éminents économistes Knut Wicksell et Maurice Allais, spécialisés dans les questions monétaires, ont démontré que la croissance à long terme du marché obligataire d’un pays est équivalente à la croissance économique de ce pays. Ainsi, tout krach obligataire significatif indique une détérioration marquée de la croissance des profits du pays en question. Par conséquent, il est légitime de s’attendre à une baisse correspondante sur le marché des actions.
Le cas de l’Allemagne
Examinons d’abord le cas de l’Allemagne. Une chute de 38% sur son marché obligataire depuis 2020 est significative et suscite des inquiétudes. L’Allemagne rompt de manière sans précédent la relation entre sa croissance à long terme et son marché obligataire. Deux scénarios se dessinent : soit il s’agit d’un incident ponctuel, et il est judicieux d’investir massivement dans les obligations allemandes en anticipant un retour à la moyenne, soit la situation est plus préoccupante.
En observant le graphique ci-dessus du cours du DAX, l’indice allemand, on constate une croissance soutenue, affichant une hausse de plus de 20% en trois ans. Cependant, le problème réside dans le fait que les dix entreprises responsables de 60% de la performance du DAX sont principalement des sociétés exportatrices, bien que leur centre de production demeure largement en Allemagne. Elles ne reflètent donc pas l’économie locale allemande, mais plutôt la santé de l’économie mondiale, une distinction cruciale. Pour une perspective sur l’économie locale, il convient d’observer l’indice des petites capitalisations, les PME communément appelées « small caps ». À ce stade, les chiffres présentent une perspective moins positive, avec une diminution d’environ 20% depuis 2020. Cela raconte une histoire bien différente.
En ce qui concerne la France, l’indice affiche une baisse de l’ordre de -25%, et pour les États-Unis, la situation n’est pas non plus florissante.
Le problème des déficits
Il est à noter que d’autres éléments cruciaux contribuent à expliquer la résistance des marchés boursiers malgré le récent effondrement des marchés obligataires occidentaux. Un aspect préoccupant émerge lorsque l’on examine le déficit de la France. Les prévisions pour l’année 2023 indiquent un déficit d’environ 4%, alors que celui-ci était déjà de 6,5% du PIB en 2022. Une tendance similaire se manifeste aux États-Unis, avec un déficit d’environ 5,5% en 2022 et une projection de 6,3% pour 2023. Cette observation suscite des inquiétudes légitimes, car en temps de croissance, les déficits budgétaires sont généralement destinés à diminuer, et non à augmenter.
Malgré une année économiquement calme, sans crise liée aux mesures anti-COVID ou à de nouveaux conflits majeurs, les déficits enregistrés aux États-Unis et au sein de l’Union Européenne semblent être assimilables à des déficits de relance propres à une période de crise. Cette constatation conduit à affirmer avec une certaine réserve que le tissu économique au sein de l’UE a été substantiellement affecté, tout en étant soutenu par des niveaux de dépenses publiques extrêmement élevés. En conséquence, il devient difficile d’envisager une résolution favorable de cette situation.
Le problème de l’énergie
À ce stade, il convient de distinguer nettement entre les États-Unis et l’Union Européenne, deux entités qui évoluent dans des configurations radicalement différentes. En effet, les Américains disposent d’une abondance d’énergie, tandis que les habitants de la zone euro font face à une pénurie énergétique préoccupante. Cette disparité a des implications majeures, car la croissance économique repose à hauteur de 98,5% sur l’énergie transformée.
En ce qui concerne l’Allemagne, bien qu’elle jouisse d’une position financière relativement favorable avec une dette moindre, elle a néanmoins investi ses excédents considérables accumulés au cours des deux dernières décennies dans les énergies renouvelables. Parallèlement, elle a fermé ses centrales nucléaires et investi dans des installations fortement consommatrices de gaz. Les énergies renouvelables, onéreuses dans un réseau électrique dépourvu de centrales nucléaires et de centrales à gaz, ont conduit à une infrastructure de production d’énergie défaillante, incapable d’offrir des perspectives de croissance au pays.
Dans ce contexte, les usines financées par les excédents allemands, consommant d’importantes quantités d’énergie, semblent destinées à quitter l’Allemagne pour s’établir aux États-Unis. En effet, les États-Unis disposent d’une offre énergétique solide et attirent activement les industriels européens, déployant le tapis rouge pour faciliter leur implantation outre-Atlantique. Ainsi, l’Allemagne se retrouve inévitablement et logiquement en récession, une situation qui survient à un moment critique, car c’est toute l’Union Européenne qui semble être en train de basculer.
Le cas de la France
En ce qui concerne la France, les indicateurs avancés de l’INSEE laissent entrevoir une récession imminente, étant donné leur délai de trois mois sur la réalité économique. Par rapport à d’autres nations, la France ne risque pas de perdre ses usines, principalement en raison de leur nombre déjà limité. Avec une part de production industrielle représentant environ 12% de son PIB, la France se situe en deçà des 25% de la Suisse et des 20% de l’Allemagne.
Cependant, la question cruciale demeure : comment la France va-t-elle surmonter cette période difficile ? La réponse traditionnelle à une récession consiste à abaisser les taux d’intérêt pour stimuler les investissements des entreprises et relancer l’économie. Il est important de rappeler que le taux d’intérêt fixé par la banque centrale doit correspondre à la capacité d’un pays à générer de la richesse pour rémunérer ceux qui ont prêté des fonds à l’État français, englobant ainsi non seulement les détenteurs fortunés, mais également les citoyens à travers leurs assurances-vie, produits bancaires et autres plans d’épargne liés à la préparation de la retraite.
Toutefois, une complication émerge. Étant donné les niveaux records de dette et de déficits, il n’est pas exclu que les marchés commencent à exiger une prime de risque plus élevée pour le remboursement de la dette dans les trimestres à venir. En effet, une partie du taux d’intérêt correspond toujours à la rémunération du risque de non-remboursement. Actuellement, la France entre dans une récession avec une dette disproportionnée par rapport à sa prime de risque habituelle, notamment depuis qu’elle n’a plus une dette notée AAA. Il existe un risque réel de tomber dans une trappe à dette, où les intérêts de la dette dépassent la croissance du pays.
Si un déficit de 4% en période de croissance peut se transformer en un déficit cumulé de l’ordre de 12% en récession, combiné à un déficit des comptes courants de 2%, cela pourrait rapidement conduire à un déficit global incompatible avec des taux d’intérêt à long terme de 2%. Dans cette situation, même si la BCE abaisse les taux, cela ne garantit pas que la France pourra se refinancer sur les marchés. Les seuls investisseurs potentiels pourraient être contraints d’acheter de la dette française en raison de contraintes légales et fiscales, ou alors il pourrait y avoir recours à l’impression monétaire par la banque centrale. Toutefois, l’inflation représente un défi potentiel lorsqu’on injecte massivement de la liquidité sur le marché. Malgré ces défis, si cela est techniquement possible, cela pourrait être mis en œuvre, bien que cela ne soit pas nécessairement la solution idéale.
Le choix que vous devez faire
Cette discussion nous conduit sur un terrain où il est nécessaire de prendre position. Soit vous êtes profondément attaché à la France et prêt à vivre et prospérer dans un pays en déclin, soit vous êtes disposé, voire désireux, d’explorer d’autres horizons pour que le pays où vous résidez devienne un catalyseur de votre croissance plutôt qu’un frein.
C’est pourquoi je suggère à toutes les personnes disposant de ressources financières ou de compétences professionnelles utiles à l’économie d’un pays de réfléchir à l’expatriation, notamment vers la Suisse, une option que j’ai personnellement expérimentée. La Suisse est actuellement assez accessible pour les personnes disposant soit de moyens financiers soit de compétences professionnelles utiles, que vous soyez coiffeur, infirmière, ou d’une autre profession, résidant dans un pays de l’UE. Ce qui rend la Suisse particulièrement intéressante, c’est sa résilience en Europe, et cela s’explique aisément.
La dette de la Suisse tourne autour de 40% depuis les années 50, et sa balance des comptes courants affiche systématiquement un excédent d’une année à l’autre. La Banque Nationale Suisse gère efficacement sa monnaie, ce qui entraîne une appréciation régulière du Franc Suisse par rapport aux monnaies européennes depuis des décennies. En conséquence, le taux de chômage est pratiquement nul, avec une situation de plein emploi, tandis que l’inflation reste très maîtrisée, oscillant entre 1,5% et 3%. En somme, l’antifragilité de la Suisse découle de sa bonne gestion interne, en faisant ainsi le refuge de prédilection des Européens qui envisagent l’expatriation. En fin de compte, la Suisse se classe comme le 8e pays le plus heureux au monde, devant la France qui occupe la 21e place en 2023.
Pourquoi la Suisse n’est-elle qu’en 8e position, me demanderez-vous, derrière des pays scandinaves ? Le professeur John Helliwell, qui travaille sur ces enquêtes, évoque la qualité des relations avec les institutions et un État providence très généreux. Certes, cette générosité s’accompagne d’un taux d’imposition parmi les plus élevés au monde dans les pays nordiques, qui sont également parmi les plus heureux. Ainsi, chacun fera son choix entre un pays qui assume son libéralisme et des pays nordiques très sociaux-démocrates, selon ses affinités.
Si vous souhaitez en savoir plus sur ma formation dédiée à l’expatriation en Suisse, je vous invite à découvrir les nombreux aspects de cette expérience à travers mon programme spécialisé. Explorez des modules regorgeant d’informations, bénéficiez de conseils pratiques et plongez dans des analyses approfondies.
Enfin, pour ceux qui se demandent si partir ou rester a un impact sur la trajectoire de la France, je vous conseille de visionner la vidéo ci-dessus dans laquelle je détaille les mécanismes des conflits en cours, en commençant par le conflit ukrainien, qui accélère la phase de déclin que nous connaissons en France. Les dynamiques historiques globales sont ce qu’elles sont, et je vous invite à explorer plus en profondeur la puissance de ces phénomènes qui sont à l’œuvre à l’échelle mondiale.
Richard Détente