Marché Boursier Américain : des actions avec un risque maximum ?

1 mai 2022

En septembre 2021, le marché boursier américain a atteint de nouveaux sommets. Les indices S&P 500 et Nasdaq Composite se sont tous les deux placés à des niveaux records. La raison ? L’annonce sur le fait que les demandes hebdomadaires d’allocations chômage aux États-Unis avaient atteint leur plus bas niveau depuis le début de la crise de Covid-19. On commence à se lasser de cette situation qui, visiblement, se répète sans arrêt. Les marchés semblent constamment battre leur précédent record historique, pour le plus grand bonheur des investisseurs dans le marché américain. Et ce, en dépit des nuages noirs qui s’amoncellent au-dessus de l’économie réelle. Pourtant, certains signes semblent sonner la fin de la fête sur les marchés.

Une baisse habituelle des marchés en septembre

 

Une baisse des marchés boursiers américains au mois de septembre n’est pas vraiment une surprise pour qui connaît l’histoire. Le cabinet d’études CFRA s’est penché sur la question sur une période qui remonte à la seconde guerre mondiale et a établit le fait que, plus de la moitié des fois, le S&P 500 enregistrait un rendement négatif au mois de septembre.

L’impact du variant Delta sur l’économie à la rentrée 2021

Mais ces données historiques ne sont pas la seule raison de nos inquiétudes. Les mauvaises performances économique de septembre se sont aggravées avec la propagation du variant delta.

Déjà au mois d’août, Joe Biden s’était ému de la faiblesse de la reprise de l’emploi, signalant que le variant avait probablement effrayé les personnes en recherche de travail. De la même manière, il avait découragé les consommateurs de prendre l’avion, de faire des achats ou de manger au restaurant pendant les vacances d’été. 

Mais ensuite, les inquiétudes se sont cristallisées autour des décisions à venir de la Réserve fédérale américaine (la Fed). Vendredi 27 août 2021, elle a indiqué qu’elle commencerait à réduire son programme d’achat d’obligations avant la fin de l’année 2021. Cette annonce avait déjà été anticipée par les marchés, contrairement à une annonce similaire effectuée le 18 août, qui avait vu les marchés américains et européens baisser de concert. Le CAC 40 quant à lui avait lui-même baissé de 2,43 %.

Mais en ce mois d’août 2021, les marchés avaient apparemment déjà intégré et digéré l’annonce faite depuis Jackson Hole. Rappelons ici que si le CAC40 a gagné 1,5 % depuis l’année dernière, il a connu bien des hauts et des bas entre-temps. Cette année n’aura pas été simple… Mais lors de cette conférence de Jackson Hole, Jérôme Powell n’avait pas dit grand-chose. Il avait simplement confirmé ses propos précédents.

C’est courant septembre que la FED a précisé à partir de quelle date elle allait commencer à réduire son soutien à l’économie américaine. Et même si la FED ne compte pas réduire son programme d’achat d’obligations avant un certain temps, les marchés boursiers, cette fois, seront bien obligés de se confronter à la réalité.

Les effets du rachat des dettes américaines par la FED

Puisque les investisseurs pourront mettre une date à la réduction des mesures de soutien de la FED, et que les marchés anticiperont les conséquences de ces réductions, on peut considérer que le risque sera maximal sur les marchés avant que la FED ne commence à réellement prendre ces mesures.

Christopher Waller, l’un des gouverneurs de l’institution, a même déclaré dans une interview sur la chaîne CNBC que l’afflux de capitaux injectés dans l’économie américaine pour surmonter l’épisode Covid-19 et réalisés via l’achat d’actifs pourrait se voir réduits à partir du mois d’octobre.

Vous vous demandez peut-être qu’est ce cela signifie concrètement ? Eh bien, l’année dernière, la Fed a abaissé les taux d’intérêt à un niveau proche de zéro et a commencé à acheter, chaque mois, pour 120 milliards de dollars d’obligations. Le tout étant destiné à contrecarrer les effets dévastateurs occasionnés par la crise du Covid 19. Et cela a fonctionné : ce déluge d’argent bon marché a permis à l’économie de rester debout et a soutenu les marchés jusque-là.

Depuis le début, les investisseurs savaient que la FED annoncerait un jour la fin du programme d’achat d’obligations, sifflant ainsi la fin de la partie. De nombreux observateurs avaient prévu que Jérôme Powell l’annoncerait lors de la conférence de Jackson Hole qui a eu lieu fin août, et Ils ne se sont pas trompés. La Fed a déclaré que le fort rebond économique signifiait qu’elle pouvait commencer à réduire ses achats mensuels d’obligations avant la fin de l’année 2021.

Des taux d’intérêts négatifs… pas prêts de remonter

Vous vous demandez peut-être comment ces informations peuvent vous être utiles ? Pour mieux le comprendre, il faut commencer par prendre un peu de recul et se souvenir qu’il y un éléphant dans la pièce, dont personne ne parle. Cet éléphant : c’est le taux d’intérêt à zéro. La vraie question à se poser, c’est : QUAND la FED a-t-elle prévu de remonter les taux d’intérêt américains ? Eh bien, sur ce point précis, on pourrait se croire tranquille. 

L’économie devrait apparemment continuer à marcher sur la tête : La Fed a fait remarquer que la réduction progressive des achats d’obligations ne devait pas être interprétée comme un signe de relèvement des taux d’intérêt. La FED a clairement signifié qu’elle ne remontera les taux d’intérêt que lorsqu’elle aura la certitude que le marché du travail est suffisamment solide pour se maintenir, en dépit de taux d’intérêt plus élevés. 

Mais avec les dégâts causés à l’emploi par la pandémie, la banque centrale estime que ce retour à la normale du marché de l’emploi américain pourrait s’étaler jusqu’à fin 2022, voire jusqu’en 2023. On est dès lors pleinement rassurés : les entreprises zombies ont encore de beaux jours devant elles. Je vous rappelle qu’une entreprise zombie est une société qui paie plus d’intérêts sur sa dette qu’elle ne dégage de bénéfices. On comprend facilement comment des taux d’intérêts peu élevés favorisent la zombification de l’économie.

Aux USA le problème est moins prononcé qu’en Europe mais il se développe fortement :

Quelles sont les conséquences de cette situation pour les marchés boursiers ?

Un meilleur rendement des obligations américaines

Pour répondre rapidement, ça signifie que le TINA (there is no alternative, traduit en français par il n’y a pas d’alternative), c’est terminé. Si les marchés boursiers ont jusque-là profité à plein des programmes d’achat d’obligations de la Fed, c’est que les investisseurs ne voyaient pas d’alternative de placement (TINA). Ce que ça signifie concrètement, c’est que les programmes d’achat massifs d’obligations de la Fed, par le jeu de l’offre et de la demande, ont tellement fait baisser les rendements obligataires que les actions étaient devenues la seule solution viable pour les investisseurs de réaliser du rendement. 

Mais comme la Fed se prépare à réduire la quantité d’obligations qu’elle achète, la demande pour ces titres va baisser, et toujours par le jeu de l’offre et de la demande, cette baisse de la demande devrait entraîner une baisse du prix des obligations et donc, mécaniquement, une augmentation de leur rendement

Une baisse des prix des actions

Dès que ce rendement des obligations va augmenter, le marché des actions, historiquement surévalué, va commencer à paraître beaucoup moins attractif pour les investisseurs. Pour que vous puissiez vous faire une idée du niveau démesuré de surévaluation de ce marché action, on va rappeler ici que, d’un point de vue historique, si on remonte à 1988, une action du S&P 500 se paie en moyenne 19 fois les bénéfices. Ce sont les données de S&P Dow Jones. 

Pour vous donner un exemple pas forcément représentatif du marché, mais qui vous permettra de situer le niveau de surévaluation, en septembre 2021, l’action d’Amazon s’échangeait à 84 fois les bénéfices. Alors que l’indice S&P 500 se paye aujourd’hui 23 fois les bénéfices. Ce qui équivaut pour les spécialistes à une surévaluation de 20 % des valeurs américaines. 

Autant vous dire que si on sort du TINA, les actions devraient être rapidement délaissées, aussi rapidement qu’on les pense surévaluées. À ce petit jeu, ce sont les premier à sortir qui remportent la mise, les autres restent bloqués avec des actions payées trop cher.

La baisse de la croissance économique américaine

Autant vous dire que le mois de septembre semble cocher toutes les cases pour un risque maximal sur les marchés. Alors vous allez probablement me demander pourquoi vous devriez vous inquiéter d’une telle situation du marché boursier américain ?Je vais vous répondre rapidement : parce que quand les États-Unis s’enrhument, c’est l’économie mondiale qui tousse. Et il est très possible que ce qui s’est produit au mois de septembre dernier soit un peu plus qu’un simple rhume. Et si c’est le cas, toutes les bourses mondiales suivront le mouvement…

S’il vous reste un peu d’optimisme, ne vous en faites pas, c’est loin d’être terminé. Les économistes semblent déjà savoir ce qui se prépare : ils ont réduit leurs prévisions moyennes de croissance économique américaine pour le troisième trimestre, leur prévision est passée de 6,9 à  à 6,2 % il y a quelques mois. 

Mais ce qui pourrait encore plus nous inquiéter, c’est que, comme le souligne Rebecca Patterson (directrice de la recherche sur les investissements chez Bridgewater Associates) dans un droit de réponse du Financial Times : « On a le sentiment que les marchés passent complètement à côté de la menace que représente l’inflation américaine ». Parce que l’inflation aux États-Unis connaît son rythme le plus rapide depuis 13 ans, + 3,9 % sur un an, en mai 2021, pour l’indice PCE (indice des prix des dépenses de consommation personnelle) et de + 5,4 % en juin pour l’indice CPI (indice des prix à la consommation).

Le retour de l’inflation aux États-Unis

Pour 2021, le Fonds monétaire international (FMI) anticipe une inflation à 4 % pour les États-Unis. On est loin des 2 % d’inflation, un objectif fixé par la FED elle-même.

L’inflation qui marque cette reprise économique résulte d’une combinaison de plusieurs facteurs :

  • des pénuries d’approvisionnement, liée à la fermeture des économies pendant les périodes de confinement ;
  • une épargne supplémentaire causée par les injections répétées d’hélicoptère monétaire ;
  • une difficulté à consommer, liée aux mesures sanitaires et d’une sorte d’explosion de la demande, cette demande ayant été refoulée chez les consommateurs depuis le début de la pandémie. 

Toutes ces causes expliquent en grande partie les augmentations de prix qu’on voit apparaître dans les chiffres officiels du gouvernement, et à la pompe à essence, dans les magasins d’articles ménagers, dans les supermarchés, chez les concessionnaires de voitures d’occasion ou dans le prix de l’immobilier.

Les États-Unis pourraient essayer de contenir l’inflation en remontant les taux d’intérêts mais là encore, la FED se heurte à un mur de difficultés. La première de ces difficultés, c’est que les États-Unis sont criblés de dette, et que remonter les taux d’intérêt les obligerait à payer cher cette dette accumulée.Vous vous souvenez de l’éléphant dans la pièce ?

Le problème épineux de la dette cumulée

La dette cumulées pose un problème de taille. Problème qui a poussé Janet Yellen à manifester ses inquiétudes sur la situation de manière répétée. La secrétaire américaine au Trésor exhorte les élus à relever le plafond de la dette américaine afin de permettre aux États-Unis d’honorer leurs engagements financiers et d’éviter le défaut de paiement. Rappelons que, d’après le site usdebtclock.org, qui calcule en temps réel les indices budgétaires américains, la dette publique américaine s’élève à 28 596 milliards de dollars.

Un niveau d’endettement qui ne devrait pas s’améliorer puisque Joe Biden a prévu un budget de 6 000 milliards de dollars pour l’exercice fiscal 2022. Si le montant est bien plus élevé que, par exemple, les 4 700 dollars de budget de Donald Trump prévus pour ses dépenses de l’année 2020, il faut se souvenir que ces dépenses sont encore en-dessous des dépenses pharaoniques liées aux mesures de traitement de la pandémie de COVID-19.

Mais cette fois, les États-Unis pourrait se retrouver à court d’argent « dès le mois d’octobre 2021 » a avertit tout récemment la secrétaire au Trésor. Le plafond de la dette pose une limite à la capacité des États-Unis d’honorer leurs engagements et de financer leurs dépenses. Lorsque le plafond de la dette est atteint, le pays ne peut plus se financer par l’emprunt et doit utiliser les fonds dont il dispose. Remonter ce plafond ne signifie pas que les États-Unis peuvent dépenser plus d’argent, cela permet simplement au Trésor de payer les dépenses déjà adoptées. 

La nécessité du relèvement du plafond de la dette américaine

Un défaut de paiement des États-Unis provoquerait une déflagration financière, et mettrait en danger la confiance et la crédibilité des États-Unis à un moment délicat, où les familles, les communautés et les entreprises américaines souffrent toujours des effets de la pandémie mondiale. Rappelons qu’en 2011, l’agence de notation Standard and Poor’s avait retiré aux USA sa note « AAA », qui leur permettait d’emprunter sur les marchés au coût minimum. Une nouvelle dégradation signifierait une nouvelle hausse du coût de la dette pour les États-Unis, à un moment où elle a un besoin pressant de s’endetter davantage.

Janet Yellen a déjà mis en œuvre certaines « mesures extraordinaires » visant à suspendre les dépenses. Mais ces mesures, d’après Nancy Vanden Houten, d’Oxford Economics ne « permettraient d’emprunter qu’environ 350 milliards de dollars supplémentaires, une somme qui devrait être épuisée d’ici la fin septembre » écrit-elle.

La lettre d’investissement : le Stratégie Grand Angle

Dans la lettre d’investissement que Richard Détente corédige avec Didier DARCET, ils adoptent une démarche macroéconomique sur les marchés. En utilisant les indicateurs quantitatifs issus de Neystor, ils permettent de clarifier la situation de nos portefeuilles financiers sur des marchés perturbés.

De même, une toute nouvelle rubrique autour des crypto appelée « Le coin crypto » permet de se diversifier sur cette nouvelle classe d’actif. Pour exemple, dans le numéro de la lettre du mois de septembre, Richard nous montre comment il génère environ 10 % de rendement sur un dépôt de cash en utilisant la finance décentralisée sur la blockchain, la fameuse DeFi.

Quoi qu’il en soit, ne vous inquiétez pas, l’économie américaine a de la ressource ! J’en veux pour preuve le fait que les courtiers en ligne low cost ont vu leurs bénéfices augmenter de manière spectaculaire depuis qu’ils ont rendu l’investissement plus amusant et plus accessible pour les investisseurs en ligne.

Comment ? En réduisant massivement la quantité d’informations données aux investisseurs, en le rendant plus dynamique, par exemple en introduisant des fonctionnalités comme de dupliquer les mouvements boursiers d’un gros investisseurs à succès. Si ces aménagements n’ont certainement pas fait de l’utilisateur moyen de ces plateformes un meilleur investisseur, ils les ont conduit à négocier jusqu’à 40 fois plus d’actions que les clients des plateformes plus traditionnelles. 

Puisque je vous dis qu’il n’y a pas de quoi s’inquiéter !

Alain PONCELAS

Sources :